Quand l’ordre surgit du chaos
Il y a des moments dans la vie — individuelle comme collective — où rien ne semble pouvoir tenir. Tout semble voué à l’échec. Le sol se dérobe sous nos pas, les repères s’effondrent, le succès tant attendu, et qui paraît pourtant si logique, s’échappe comme du sable entre les doigts.
Comme si des forces inconscientes de destruction étaient à l’oeuvre.
Et pourtant
À travers le tumulte, derrière les fractures et les incertitudes, il y a quelque chose qui agit en silence. Des forces telluriques, souterraines, invisibles. Des points d’attraction étranges, que l’on ne voit pas, mais qui nous appellent. Qui nous guident, en secret, vers un ordre initial que nous avions peut-être trop tôt abandonné.
Le mental hurle parfois de terreur, ou de désespoir.
Mais cet ordre-là n’est pas une ligne droite. Ce n’est pas un retour en arrière, ni une nostalgie du passé. C’est une spirale. Une descente, profonde, vers ce qui est vivant. Vers ce qui vibre et persiste, même au cœur de la tempête.
Savoir où poser le regard
Souvent, dans ces moments, subsistent encore
Nos désirs profonds.
Notre appel à la beauté.
Notre besoin d’appartenance, de paix, de sécurité, de justice.
C’est même au cœur de cette nuit noire de l’âme que la faible lueur des étoiles les plus lointaines devient perceptible.
Mais encore faut-il savoir regarder, avoir la conscience de où poser le regard.
Ainsi, il faut parfois apprendre à regarder.
Ce que nous faisons, par exemple, dans la pratique du dessin botanique contemplatif.
Nous aiguisons notre sens de l’observation, entraînons notre esprit à capter le moindre détail qui fait toute la différence.
Un tel apprentissage, aussi anodin qu’il puisse sembler, ne nous laisse pas identique à qui nous étions autrefois.
Notre manière de voire le monde, et d’y prendre place, en est à tout jamais transformé.
De retour au bercail
Comme Ulysse, qui finit toujours par rentrer à Ithaque — jamais indemne, jamais le même.
Plus conscient. Plus lucide. Il sait désormais ce que signifie être chez soi.
Il a traversé les épreuves. Il a vu le chaos. Et pourtant, il revient. Habité. Transformé.
Alors non, je ne sais pas si c’est de la physique quantique.
Peut-être.
Mais je sais que c’est précieux.
Accueillir le chaos.
Même quand tout vacille.
Même à travers la nuit.
Trouver, au creux de soi, une étincelle.
Une confiance.
Une espérance.
Se laisser traverser par la certitude que l’ordre triomphera du chaos, le moment venu.
Élaborer les ressources intimes pour faire face
Dans un monde en crise — écologique, politique, intime — il est ainsi vital de croire encore que l’ordre peut naître du chaos. Non pas un ordre autoritaire ou rigide, mais un ordre vivant.
Une architecture intérieure qui nous permet de tenir debout, d’aimer encore, de créer, de réparer.
Reprendre ainsi le pouvoir de choisir quoi mettre dans nos assiettes.
C’est cette force-là qui irrigue mes formations, même les plus concrètes.
Au creux de la simplicité, pouvoir poser les fondations d’un savoir vivant, qui libère, qui nourrit.
Souvent, une réflexion philosophique, ou un souffle poétique accompagne la préparation d’un simple gratin de légumes.
Mais c’est que l’un n’est pas séparé de l’autre. Ils co-existent, en un échos fertile, du cœur à l’esprit, des mains à l’âme.
Ainsi, j’aime insister sur la nécessité d’enraciner le quotidien dans des pratiques terre-à-terre, pragmatiques, nous permettant de nous relier à la terre, aux saisons, aux produits et plantes. Et j’aime aussi penser que ces pratiques terriennes sont un portail vers une dimension plus spirituelle, philosophique et poétique.
Former un cercle de veille
C’est exactement dans cet esprit que j’ai ouvert un cercle de veille autour de la rédaction d’un livre en devenir, L’Herbier de Lucidité. J’y explore ce qui relie la cuisine, les plantes sauvages, la créativité, la contemplation, la simplicité. Et le politique.
Autour de ce projet, le Cercle devient ainsi un espace de parole et d’écriture, à la frontière entre lucidité et espérance.
Un lieu pour tisser ce recueil sensible et engagé où l’on parle de cuisine, de plantes sauvages, mais aussi de chaos, de traversées, de forces invisibles.
Du microcosme de nos vies et de nos cuisines, jusqu’au macrocosme des enjeux planétaires.
Parce que je crois que la lumière peut encore tenir.
Même en pleine tempête.
Parce que je crois que ta voix, ton regard, ta manière de voir le monde comptent.
Et que c’est ensemble, en nous tenant les uns les autres, que nous pouvons retrouver ce foyer d’humanité, cette spirale qui nous ramène à l’essentiel.
Rejoindre le Cercle de Veille autour de L’Herbier de Lucidité
Le Cercle de Veuille accompagnant L’Herbier de Lucidité est avant tout un lieu de partage et de réflexion. La cuisine y occupera une place moins directement concrète que dans les stages et ateliers (dates à retrouver dans la rubrique « Agenda »), ou les chroniques radio.
La participation au Cercle se fait à prix libre. Jusqu’ici, les contributions vont de zéro à 200 CHF, et aucune limite maximum n’a été fixée. Pour te donner une idée, même 5, 10, 20 ou 50 francs peuvent déjà apporter un soutien précieux à ce travail de fond. Comme une nuée de lucioles, dont la faible lueur de chacune finit par éclairer la nuit, tant leur nombre est démultiplié.
Mais ta simple présence, sans aucune contribution financière, est tout aussi précieuse. Ce cercle est un espace de reliance, pas un produit. C’est une invitation à tisser ensemble.
Régulièrement, nous allons nous retrouver pour des temps de parole partagée, en ligne. J’y présenterai une ou plusieurs thématiques en cours d’élaboration pour le livre, et j’ouvre parfois simplement la parole, pour accueillir les voix, les élans, les traversées du moment.
Tu es bienvenu·e tel·le que tu es. Avec ce que tu portes. Avec ce que tu cherches encore à formuler. Et avec ce que tu ne sais pas encore que tu cherches.
Au moment d’ouvrir ce Cercle, L’Herbier de Lucidité est finalement avant-tout un prétexte à cheminer ensemble, à ce serrer les coudes, à tisser des liens.
Rejoindre le Cercle de Veille et éclairer la nuit ensemble
Nos temps d’échange démarrent mardi 29 avril, à 20h30.