Impossible de l’ignorer.
Chaque année, le magnolia revient dans un éclat presque théâtral.
Avec ses grandes fleurs en coupe ou en étoile, il vient nous annoncer l’arrivée des beaux jours.
Il est l’un des premiers arbres à oser la floraison complète, sans attendre les feuilles, sans attendre la chaleur. Comme dans un pari fou, il clame que les beaux jours reviennent toujours.
Parmi les arbres qui annoncent le printemps, le magnolia est aussi l’un des plus éphémères.
Ses pétales, d’un blanc ivoire, parfois rosé ou violacé, tapissent bientôt le sol, une fois les premières pluies venues. Il ne dure que quelques jours, et pourtant, n’est-il pas bouleversant ?
Son nom rend hommage à Pierre Magnol (1638-1715), botaniste et médecin français, directeur du Jardin botanique de Montpellier, qui introduisit une classification des plantes annonçant celle de Linné.
Mais sais-tu que cette beauté peut aussi se goûter ?
Une fleur à croquer… avec précaution
Les fleurs de magnolia sont comestibles. À noter, cependant, que les saveurs sont relativement variables, avec un peu plus de 220 variétés disponibles. Pour plus de détails, voir le site de Robin Harford, mentionné ci-dessous.
Pour commencer à explorer cet univers de saveurs, on peut en cueillir quelques pétales au jardin ou dans les parcs (en restant respectueux de l’arbre, et en s’assurant qu’il n’a pas été traité). Leur goût est étonnamment capiteux, citronné, poivré, presque musqué, avec parfois des notes de coriandre, ou de gingembre. Une fleur qui ne laisse pas indifférent.e.
Mais il est bon de rappeler qu’on consomme seulement les fleurs, et avec parcimonie. L’écorce et les graines contiennent un alcaloïde, la magnoflorine, toxique en grande quantité, notamment pour les petits animaux. Rien d’alarmant à faible dose, mais mieux vaut rester dans quelques notes de poésie plutôt que dans l’excès.
Quelques idées sauvages et gourmandes
Les usages en cuisine sont nombreux, et souvent méconnus :
– boutons floraux braisés : ils sont d’abord revenus dans l’huile d’olive, avant d’être mijoté dans un bouillon de miso ;
– beignets de pétales à la manière des fleurs de courgette ;
– sirop ou vinaigre floral, pour aromatiser salades et desserts ;
– limonade sauvage similaire à celle que l’on prépare avec d’autres fleurs comme le sureau ou le tilleul ;
– et enfin, ce que je préfère en ce moment : le sel de magnolia.
Cette idée, je l’ai découverte grâce à Sam Black, chef passionné et généreux, qui a partagé cette recette sur ses réseaux sociaux.
Recette du sel de magnolia
Il te faudra :
- 1 part de pétales de magnolia, frais mais bien secs
- 2 parts de sel marin
- 1 tombée de vinaigre de pomme, pour limiter l’oxydation
Pile le tout au mortier, doucement, pour libérer les arômes sans les brusquer comme le ferait un blender. Le parfum se déploie dès les premiers tours : un entrelacs de citron, de gingembre, et quelque chose d’inclassable et capiteux…
Une fois le mélange homogène, étale-le sur un linge propre ou une feuille de papier cuisson, et laisse sécher à l’air libre quelques jours, ou au déshydrateur à basse température.
Une fois bien sec, ce sel floral se garde dans un petit bocal hermétique, à l’abri de la lumière. Il apportera une touche éclatante à un plat de riz, une salade de lentilles, des légumes vapeur… ou même un chocolat noir très brut.
Une fleur, du sel, de l’impertinence
Le magnolia explose en bouche comme un secret qu’on n’attendait pas.
Cette fulgurance florale, presque indécente, vient joyeusement réveiller les papilles.
Et moi… je suis en train de tomber amoureuse du printemps.
De cette précieuse insolence des fleurs, qui, toujours, reviennent.
Pleines de promesses.
Quelques références
Black, Sam, The Fermentation Kitchen, London, DK, 2024.
Harford, Robin, Eat Weeds website: https://www.eatweeds.co.uk/list-of-edible-magnolia-flowers
Pour écouter la chronique radio, c’est par ici